Les Pilotes
Le mot magique
Modalité : Jeu de rôle. Les enfants sont amené·es à aller au-devant de leurs camarades en leur posant des questions qui doivent permettre à celles·ceux-ci de deviner le mot « Amour ».
Apaiser le rapport au sentiment amoureux
- Aider les enfants à repérer ce qui les gêne dans l’utilisation du mot « Amour »
- Faire prendre conscience que la grossièreté est un mécanisme de défense
- Explorer les différents sens que prennent le mot « Amour » selon les contextes
Apaiser le rapport au sentiment amoureux
La préadolescence est un moment de passage de l’enfance à l’adolescence. Les transformations corporelles et hormonales liées à la puberté commencent et le·la préadolescent·e est balloté·e entre son identité enfantine et ses identifications à des modèles adolescents. Il·elle est trop immature pour s’engager dans la sexualité, si celle-ci doit être comprise comme le fait d’avoir des rapports sexuels génitaux (en moyenne, en France, les jeunes ont leur premier rapport sexuel génital à 17,4 ans, 17,0 pour les garçons, 17,8 pour les filles). Toutefois, ils·elles éprouvent déjà des émois qu’ils·elles ressentent avec ambivalence (excitations, sentiment d’affection, rejet et dégoût pour la sexualité). Cette ambivalence les conduits à envier comme à rejeter violemment ceux·celles de leurs camarades dont les caractères sexuels secondaires se sont développés plus précocement (surtout les filles qui se développent plus tôt que les garçons), comme ceux·celles qui qui ont un rapport plus « décomplexé » à la sexualité. La mode et certains médias destinés aux jeunes valorisent l’hypersexualisation. L’Internet peut les avoir exposé à la pornographie. Ils·elles peuvent avoir connaissance du développement de la prostitution adolescente et les jeunes filles peuvent se sentir mises en danger par le comportement d’hommes qui les abordent en feignant d’ignorer leur minorité. Ce contexte plus ou moins angoissant génère des effets de censure et de stigmatisation d’enfants qui ont un comportement ou une apparence plus sexualisée.
Aider les enfants à repérer ce qui les gêne dans l’utilisation du mot amour
Si certains enfants sont gênés par le mot amour, c’est parce qu’ils perçoivent ce sentiment comme une source de mise en danger : peur d’être pointé·e du doigt et stigmatisé·e en raison d’une prétendue sexualité.
L’enjeu est de dissocier le fait d’éprouver des sentiments d’affection, voire des sentiments amoureux, et le fait d’avoir une sexualité, au sens où les adultes l’entendent. Il faut affirmer que la loi doit les protéger de la sexualité adulte. La loi en interdisant les atteintes sexuelles (Art. 227-25 du code pénal), c’est-à-dire toute relation sexuelle entre un·e adulte et un·e mineur·e de 15 ans, et en récusant tout consentement chez les mineur·es avant quinze ans pose clairement que les enfants doivent être préservé·es des « modèles » de la sexualité adulte et qu’ils·elles doivent découvrir la sexualité par eux·elles-mêmes et à leur rythme.
Faire prendre conscience que la grossièreté est un mécanisme de défense
Les enfants doivent imaginer des devinettes qui permettront à leurs camarades de découvrir le mot « amour ». Il n’est pas rare que des enfants proposent une devinette du type : « Quand on baise, on fait quoi ? ». Il faut accueillir ce type de proposition en précisant qu’elle ne sera pas retenue parce que vulgaire, mais en ayant aussi en tête que la vulgarité est un mécanisme de défense. Les gros mots ont une fonction d’« euphémisation » : les mots obscènes, parce qu’ils sont matière à plaisanteries, ont moins de résonnance psychique que les mots « scientifiques », parce qu’ils permettent de dire la chose sans (trop) se la représenter mentalement. Par exemple, un enfant se représente plus fortement la chose, si l’on utilise le mot « pénis » que si on prononce le mot « bite », ou encore le mot « vulve » plutôt que celui de « chatte ». D’où ce constat que des enfants se sentent terriblement gêné·es lors de cours de SVT sur la sexualité, mais pas du tout quand ils·elles s’échangent des gros mots pourtant très vulgaires. Le gros mot « protège » paradoxalement le psychisme d’une représentation trop crue… mais les mots obscènes ne seront pas pour autant agréé par l’accompagnateur ou l’accompagnatrice.
Explorer les différents sens que prennent le mot « Amour » selon les contextes
En français, le mot « amour » a plusieurs significations (amour filial pour les parents, amour désirant des amants, faire l’amour…). Dans d’autres langues, il existe plusieurs mots pour distinguer différents sentiments amoureux. Par exemple, en grec, il y a le mot « éros » pour parler de la sexualité (éros chez les Grecs), « philia » pour parler de l’amour qu’éprouve les un·es pour les autres les membres d’un même groupe, qu’il s’agisse d’un couple ou d’un groupe d’ami·es et « agapé » pour parler de l’empathie, de l’amour du prochain ou encore l’amour pour les dieux.
L’exercice proposé permet de jouer avec le mot « amour » et la pluralité de sens qu’il peut prendre, en inventant des devinettes qui vont parler de réalités différentes : le sentiment filial (par exemple, en invoquant les parents dans la devinette), le sentiment amoureux (par exemple avec des métaphores : avoir des papillons dans le ventre, la Saint-Valentin, les cœurs), l’amour de soi (passer du temps devant le miroir), la passion pour une chose (manger beaucoup de chocolat, les « pommes d’amour » des fêtes foraines, passer beaucoup de temps à jouer au jeu vidéo).