Notions et concepts
La notion d’estime de soi
Travailler au renforcement de l’estime de soi, au moment de l’entrée dans la préadolescence et de l’entrée au collège est fondamental. En effet, l’entrée dans la puberté affecte fortement l’image corporelle de soi : alors que l’enfant a le sentiment que son « Moi » ne fait qu’un avec son corps, le préadolescent commence à percevoir un écart entre son « Moi » et un corps dont il subit les transformations. L’entrée au collège impose aussi d’importants remaniements psychiques en lien avec la nécessité de redéfinir sa place dans la famille et dans l’espace social. L’enfant soit s’adapter à des contraintes scolaires plus fortes, des exigences d’autonomie plus élevées…
L’estime de soi dépend de l’« amour de soi » (suis-je aimable ?), de la « confiance en soi » (suis-je compétent·e ?) et de l’ « image de soi » (les autres me perçoivent-ils·elles comme quelqu’un de valable ?).
L’estime de soi s’élabore au cours de la vie, en lien avec des expériences positives. L’« amour de soi » renvoie plutôt à la sphère de l’intime et elle est étroitement liée au fait d’avoir reçu des soins corporels et des marques d’affection et d’attention durant l’enfance (et plus tard, tout au long de la vie !). Inversement les maltraitances et les marques d’indifférence auront des effets délétères sur l’estime de soi.
La « confiance en soi » renvoie à la sphère du social. Elle est étroitement liée au fait d’avoir vécu des expériences positives où les droits des personnes sont reconnus et où l’on reçoit des encouragements à mobiliser ses propres compétences pour atteindre des objectifs qu’elle s’est fixés. La « confiance en soi » dépend aussi du regard des autres et de discours qui valorisent les effets positifs de ses actions, ce qui l’oblige à percevoir que ses actions ont des conséquences dont elle est responsable. Inversement les expériences d’infantilisation, de surprotection, de disqualification auront des effets délétères sur l’estime de soi.
L’« image de soi » renvoie à une sphère plus « identitaire » et elle est très liée au sentiment d’appartenance à des groupes sociaux et culturels dont la contribution à la société est évaluée positivement. Le fait d’appartenir à une famille reconnue, à un groupe social qui a une position socialement intéressante, le fait de s’identifier à des groupes d’appartenance dont les valeurs sont largement partagées, dont les habitudes et les goûts sont approuvés, favorise le développement d’une bonne image de soi. Inversement les expériences de discrimination et de stigmatisation ont des effets délétères sur l’estime de soi.
La notion d’estime de soi doit être maniée avec précaution et il faut se garder d’une approche « déterministe » qui laisserait penser que celles·ceux qui ont vécu des épreuves seraient irrémédiablement condamné·es à avoir une mauvaise estime d’eux-mêmes. Jusqu’à un certain point, on peut constater des effets de compensation : une personne qui a subi des maltraitances et qui sera vulnérables dans la sphère de l’intimité et des sentiments, pourra, par exemple, trouver la reconnaissance des autres dans la sphère du social et se valoriser par de forts engagements professionnels ou militants. Reste que nous n’avons pas tous·tes une estime de soi « suffisamment bonne » pour nous sentir en accord avec nous-mêmes et en capacité de vivre avec les autres dans le plaisir et dans la recherche du bonheur et du sens de la vie. Et comme tel, certain·es ont plus que d’autres besoins d’être rassuré.
La notion d’estime de soi doit être d’autant plus maniée avec précaution que pour compenser un déficit d’estime de soi, certain·es vont se créer une image d’eux·elles-mêmes survalorisée et irréaliste, notamment sous la forme de sentiments de toute-puissance, d’invulnérabilité ou encore s’imaginer des compétences qu’ils·elles sont loin d’avoir acquises.
Les conduites à risques sont paradoxalement associées à un déficit d’estime de soi (la conduite à risque comme moyen de se valoriser), mais aussi à un excès d’estime de soi (la conduite à risque comme preuve de la toute-puissance).